Le Dhamma de la Forêt



Réflexions sur les trois piliers de la voie du Bouddha :
vertu, méditation et sagesse

Ajahn Tate

Traduit par Jeanne Schut

http://www.dhammadelaforet.org/


Observer les Cinq Préceptes sert à pacifier le corps et la parole. La méditation sert à pacifier le corps et la parole. La méditation sert à pacifier l’esprit et le cœur. Si l’esprit n’est pas en paix, vous verrez peut-être les choses avec les yeux, mais ce ne sera pas aussi clair que lorsque vous les verrez avec l’esprit en paix.

Quand nous pacifions l’esprit par la méditation, nous devons apprendre à renoncer à nos habitudes, à nos attachements. Renoncer, abandonner, lâcher. En méditation, nous apprenons également à maintenir le corps et la parole en paix, c’est-à-dire que nous ne les utilisons pas pour créer la moindre agitation. En cela, nous mettons déjà en pratique les Cinq Préceptes. Quand nous méditons, nous pouvons donc dire que renoncement/générosité, vertu/bonté et concentration /contemplation font un tout.

Un esprit parfaitement paisible peut facilement voir que la sagesse est le fondement de la vertu. La sagesse nous permet de distinguer le vrai du faux, le bon du mauvais, l’action juste de l’action nuisible. Lorsque la sagesse grandit, nous savons que nous devons nous abstenir de toute action néfaste. C’est ainsi que l’on observe les Préceptes. Par conséquent, la sagesse passe avant la vertu.

C’est vrai aussi pour la méditation. Quand nous pratiquons la méditation pour parvenir à nous concentrer sur un objet puis uniquement sur le cœur, nous devons avoir une certaine sagesse, de la finesse et de l’intelligence. Nous devons purifier notre cœur de tous côtés. Autrement dit, nous devons être attentifs à nos sens en ne les laissant pas vagabonder dans des pensées. Nous voyons que ces vagabondages sont dangereux, ce qui nous pousse à les abandonner. C’est de cette manière que nous touchons à la paix.

Regardons maintenant les choses de la perspective opposée. Traditionnellement, on place la sagesse en dernier. Dans ce cas, la sagesse est considérée comme le plus haut degré. C’est la sagesse qui permet de pleinement réaliser la Vérité. Si nous n’avons observé aucun précepte et jamais connu la concentration en méditation, il est impossible que la sagesse grandisse. Il est indispensable que la sagesse, qui est le fondement de la vision pénétrante, s’appuie sur la parfaite observance des Préceptes et la concentration méditative, en particulier au niveau d'appana-samadhi, le premier niveau des jhāna. La vision pénétrante ne se manifeste qu’une fois que l’on sort doucement de la pleine concentration d’appana-samadhi. Dans ce cas, la sagesse est positionnée tout à la fin.

Certaines personnes pragmatiques qui considèrent que la sagesse arrive avant la vertu et la méditation peuvent penser qu’il s’agit là d’une erreur. Néanmoins, ceux qui ont atteint la vision pénétrante voient la grandeur et la finesse de l’explication donnée par le Bouddha. Ils sauront également voir la validité de toutes ces explications différentes puisqu’elles correspondent à différents niveaux du Dhamma. La sagesse au plus haut degré est appelée pañña vipassana. Elle nous permet de lâcher tous nos attachements (upadana).

Quant au mot « Vipassana », il signifie comprendre la réalité telle qu’elle est véritablement, de façon à nous permettre de nous libérer de tout attachement au « moi ».

Pour pratiquer Samatha et Vipassana, mieux vaut ne pas vous encombrer de livres. Rangez-les, vous éviterez ainsi d’être pédant. Entraînez plutôt votre cœur et votre esprit pour faire l’expérience de la paix et de la concentration.