Le Dhamma de la Forêt


Le Dhammapada

   

Nouvelle traduction par Jeanne Schut 
extrait de "Les Plus Belles Paroles de Bouddha", publié aux Editions SULLY.

http://www.dhammadelaforet.org
   


XXIV. Versets sur l’avidité

Tanha-Vagga

 

 
  334
Quand on vit sans attention, négligemment,
Le désir grandit comme un lierre grimpant.
On court ici et là, d’une vie à l’autre, sans arrêt,
Comme un singe cherchant des fruits dans la forêt.


  335 - 336
Quand, dans le monde, le désir grossier
S’attache à vous, que vous êtes submergé,
Votre malheur croît et se multiplie
Comme l’herbe sauvage après la pluie.

Mais si, dans le monde, vous parvenez à dépasser
Ce désir grossier si difficile à repousser
Le malheur ne vous atteint pas plus
Que la rosée glissant sur la feuille du lotus.


  337
A vous tous, ici rassemblés,
Je souhaite le bonheur et la paix.
Puissiez-vous parvenir à déraciner le désir et le mal
Comme on déracine avec soin une plante médicinale.
Ne laissez pas Māra vous entraîner de nouveau
Comme la rivière en crue arrachant le roseau.


  338
Si ses racines restent fortes et intouchées,
Un arbre, même coupé, repoussera.
Si le désir latent n’est pas déraciné,
La souffrance aussi, encore et encore, reviendra.



  339 - 340
L’homme grossier dans lequel le désir aux trente-six courants
Déferle vers tout ce qui est attirant,
Est emporté par le flot de ses opinions
Qui sont erronées car basées sur la passion.

Ces courants coulent dans toutes les directions
Et le lierre des désirs grandit à foison.
Voyant que ce lierre croît sans cesse,
Coupe-le à la racine avec sagesse.


  341
Les sentiments de joie et de plaisir
Sont faciles à obtenir.
Mais ceux qui s’attachent à leurs désirs
Devront, encore et encore, renaître et mourir.


  342 - 343
Assiégés par des désirs incontrôlés,
Les gens se démènent comme des lapins piégés.
Etroitement ficelés par la soif des plaisirs
Longtemps encore ils devront souffrir.

Assiégés par des désirs incontrôlés,
Les gens se démènent comme des lapins piégés.
Un moine doit donc renoncer au désir
Si c’est à l’abandon des passions qu’il aspire.


  344
Sorti du sous-bois de la vie dans le monde, il y reste attaché,
La forêt des désirs irrésistiblement l’attire.
Voyez comme un homme pourrait trouver la paix
Mais aussitôt s’en retourne, par le monde enchaîné.


  345 - 347
« Les liens qui vous attachent ne sont pas si solides
Quand ils sont en fer, en bois ou en raphia », dit le sage.
« Mais être séduit et attiré par bijoux et colifichets
Désirer femmes, enfants et foyer,
Voilà qui crée des liens solides », dit le sage.
Ces liens qui vous étouffent sans paraître serrés,
Sont bien plus difficiles, pourtant, à dénouer.
Mais le sage y parvient : abandonnant le désir
Il renonce au monde et à ses plaisirs.

Ceux que la passion a piégés
Retombent dans le tourbillon qu’ils ont eux-mêmes créé
Comme une araignée prisonnière de sa propre toile.
Mais le sage, abandonnant le désir, 
Abandonne la souffrance en renonçant au monde.


  348
Arrivé au-delà du devenir,
Tu peux lâcher passé, présent et avenir.
Le cœur et l’esprit totalement libérés, sans saisir,
Tu ne reviendras plus pour naître et pour mourir.


  349 - 350
Chez une personne obsédée par ses propres pensées,
Dominée par la passion, attirée par la beauté,
L’avidité ne fait que grandir :
Elle resserre elle-même ses liens à plaisir.

Mais une personne qui aime apaiser ses pensées,
Toujours attentive, méditant sur les impuretés,
Une telle personne coupera
Tous les liens de Māra.


  351 - 352
Parvenu au bout du chemin, libéré du désir,
Il a enfin brisé les flèches du devenir.
Libre de toute peur et de toute impureté,
Ce corps qu’il habite sera son dernier.

Libéré du désir et de tout attachement,
Il a une parfaite maîtrise de l’agencement
Des mots, de leur étymologie, de la grammaire.
Il ne reviendra pas. C’est un sage et un expert.


  353
J’ai tout conquis,
J’ai tout compris,
Pourtant même à cela je ne suis pas attaché.
J’ai tout abandonné,
L’extinction du désir m’a libéré.
Ayant découvert cela par moi-même, directement,
Qui donc est mon maître maintenant ?


  354
Le don du Dhamma surpasse tous les dons,
La saveur du Dhamma surpasse toutes les saveurs,
La joie née du Dhamma surpasse toutes les joies,
La fin de tout désir triomphe de tous les maux.


  355
La richesse est la ruine de l’homme sans discernement,
Pas celle du sage en quête de sublime.
En désirant la richesse, l’homme sans discernement
Cause autant sa ruine que celle de ses victimes.



  356 - 359
La mauvaise herbe est le fléau des champs cultivés
Comme la passion le fléau de l’humanité.
C’est pourquoi ce qui est offert à qui est libre de passion
Rapporte, à celui qui offre, une grande moisson.

La mauvaise herbe est le fléau des champs cultivés
Comme l’aversion le fléau de l’humanité.
C’est pourquoi ce qui est offert à qui est libre d’aversion
Rapporte, à celui qui offre, une belle moisson.

La mauvaise herbe est le fléau des champs cultivés
Comme l’ignorance le fléau de l’humanité.
C’est pourquoi ce qui est offert à qui est libre d’ignorance
Rapporte, à celui qui offre, des fruits en abondance.

La mauvaise herbe est le fléau des champs cultivés
Comme l’avidité le fléau de l’humanité.
C’est pourquoi ce qui est offert à qui est libre d’avidité
Rapporte, à celui qui offre, des fruits en quantité.