Le Dhamma de la Forêt


Témoignages de personnes qui ont connu Dipa Ma

Extrait du livre d’Amy Schmidt : 

Dipa Ma,présence et rayonnement d'une femme bouddhiste.



Dipa Ma couv;

aux éditions SULLY

Traduction de Jeanne Schut

http://www.dhammadelaforet.org/


Par une belle matinée, dans un café de Santa Barbara, quelqu’un demanda à Sharon Salzberg : « Qu’est-ce que Dipa Ma vous a offert de plus beau ? »

Sharon a réfléchi un instant et puis son visage s’est adouci dans un sourire :
« Dipa Ma m’aimait, dit-elle. Et quand elle est morte, je me suis dit : Est-ce que quelqu’un m’aimera encore de cette façon ?’ »
Elle resta silencieuse un moment et c’était comme si une porte s’était entr’ouverte sur un autre monde et là, il n’y avait qu’une seule chose : un amour total et entier.
« Bien sûr, ajouta Sharon avec un sourire paisible, ce n’était pas que moi. Ce n’était pas personnel. »

Jacqueline Mandell a demandé un jour à Dipa Ma si elle devait pratiquer la pleine conscience ou l’amour inconditionnel. Dipa Ma lui a répondu : « D’après mon expérience, il n’y a aucune différence entre les deux. » Pour elle l’amour et la pleine conscience formaient un tout. Si on y réfléchit bien, quand notre cœur déborde d’amour, ne sommes-nous pas pleinement présents et conscients ? Et la pleine conscience n’est-elle pas l’essence de l’amour ?

Joseph Goldstein se rappelle avoir vu Dipa Ma s’agenouiller un jour devant le Bouddha et ce qu’il a ressenti clairement à ce moment-là, c’est qu’il n’y avait « personne », seulement l’amour s’inclinant devant l’amour.

Un autre de ses disciples a dit : « Pour Dipa Ma, l’Eveil était synonyme d’amour immense. Ses enseignements revenaient sans cesse sur la relation aux autres et la gentillesse. » Son cœur, comme la porte de son appartement, était toujours ouvert. Et dans ce grand cœur, tout le monde, heureux ou malheureux, pouvait aller et venir, et toujours être accueilli avec amour.

Un maître soufi, Asha Greer, raconte que Dipa Ma l’a pris un jour dans ses bras « avec tant d’amour que mon mètre quatre-vingts a pu tenir dans son vaste cœur où la vacuité laissait assez de place pour toute la création. »


Anecdotes de Steven Schwartz chez qui Dipa Ma a séjourné aux États-Unis.

Pendant deux ou trois ans, on aurait dit que chaque fois que j’allais à New York ma voiture était forcée et ma radio volée. J’avais été invité au mariage d’un ami dans le Queens et j’ai dit à Dipa Ma que je pensais prendre le train parce que je me faisais toujours voler ma radio. « Ne sois pas bête, me dit-elle. Vas-y en voiture. »

Nous avons donc fini par prendre la voiture dans laquelle j’avais, entre-temps, fait installer un système d’alarme. Nous l’avons garée et sommes allés au mariage. En sortant, j’ai tout de suite vu qu’on avait encore forcé ma voiture. Cette fois, on avait non seulement volé la radio mais aussi toutes mes cassettes.

En rentrant chez moi [où Dipa Ma était hébergée pendant son séjour aux Etats-Unis] Dipa Ma m’a demandé : « Alors, comment s’est passé le mariage ? »
– Le mariage était parfait. Mais on a encore forcé ma voiture et volé ma radio. Je suis vraiment furieux. 
Dipa Ma a éclaté de rire.
– Qu’y a-t-il de si drôle ? 
– Tu as dû être voleur dans ta vie précédente. Combien de fois crois-tu que tu devras encore te faire voler une radio ? 
– A vous de me le dire. Combien de fois encore ? Dites-le moi, comme ça je serai prêt.
Ignorant ma question, elle m’a demandé :
– Qu’est-ce que tu as fait ? Comment as-tu réagi quand tu as vu que la voiture avait été forcée ?
– J’étais très en colère parce que c’est arrivé déjà tellement souvent. En plus, je croyais être protégé par le système antivol.
Elle m’a regardé, l’air stupéfait :
– Tu veux dire que tu n’as pas eu une seule pensée pour la personne qui a pris ta radio ? Tu n’as pas pensé à la triste vie que doit mener le voleur ?
Elle a fermé les yeux et a commencé à psalmodier à voix basse. Je savais qu’il s’agissait d’une bénédiction d’amour bienveillant qu’elle adressait au voleur. Ce fut une merveilleuse leçon pour moi.


********


Quand Dipa Ma est arrivée chez nous la première fois, elle et Rishi [son petit-fils] n’étaient pas à l’aise avec notre chien. Elle n’avait jamais vécu dans une maison où un chien habitait à l’intérieur. Dans son quartier de Calcutta, les chiens étaient généralement porteurs de maladies de sorte qu’avoir des chiens à la maison paraissait insensé.

Pourtant, en quelques semaines, une transformation merveilleuse s’est produite entre elle et le chien. Dog est le premier mot d’anglais qu’elle a appris. Tous les matins, elle descendait de sa chambre et demandait maladroitement en anglais : « Le chien, où est le chien ? » Et aussitôt Yeats, notre chien, accourait. Elle s’agenouillait et le caressait affectueusement, de la même manière qu’elle caressait parfois les méditants.

Yeats adorait cela. C’était très beau de voir le lien qui s’était tissé entre eux, d’autant qu’elle avait été si mal à l’aise au début, à cause de son conditionnement culturel. Maintenant elle le portait dans son cœur et ils étaient devenus de grands amis. Le jour de son départ, elle s’est baissée à la hauteur de Yeats, lui a parlé et lui a donné une bénédiction pleine d’amour.


Souvenir de Sharda Rogell

Quand Dipa Ma a quitté l’IMS, nous étions une vingtaine à nous tenir près d’elle pour lui dire adieu, mains jointes au niveau du cœur. Sans raison apparente, juste avant d’entrer dans le van, elle s’est tournée vers moi et a posé ses mains sur les miennes. Toute proche de moi, elle m’a regardé droit dans les yeux et a continué à tenir mes mains en silence. Elle a fixé sur moi un regard chargé de pur amour, de pure vacuité, de pure attention. Dans l’espace de cette minute, elle m’a offert une parfaite transmission d’amour inconditionnel… La shakti [énergie spirituelle] se déversait à flots de son cœur. Ensuite, elle s’est retournée et elle est entrée doucement dans la voiture.

Elle m’a montré ce jour-là une forme d’amour que je n’avais jamais ressentie auparavant. Une sorte d’amour rare sans séparation ni différences. C’était la première fois que je goûtais à ce qui peut se passer en présence d’un être éveillé. Ce moment-là est toujours aussi fort en moi aujourd’hui que s’il s’était passé hier.

Connaître cet amour et voir qu’il est possible de l’offrir aux autres a été pour moi une véritable inspiration sur mon chemin spirituel. Dipa Ma est un exemple de la façon dont l’amour peut jaillir de nous quand le cœur est libéré de la peur.


Un simple conseil de Dipa Ma

J’ai connu une période difficile dans ma vie. Mon mariage battait de l’aile et je n’étais pas fière de mon manque de patience vis-à-vis de mes enfants. Bizarrement, c’est aussi à cette époque que, extérieurement, la vie semblait me sourire le plus ; j’aurais donc dû être heureuse. J’ai mentionné ma situation à Jack Kornfield et il m’a parlé d’un maître, une femme extraordinaire qu’il avait rencontrée en Inde, qui séjournait alors tout près de là, chez Sylvia Boorstein.

Quand je suis arrivée chez Sylvia, on m’a aussitôt conduite dans la chambre sous les combles. Dipa Ma était assise sur un zafu, un traducteur à sa gauche. Je me suis installée sur le coussin face à elle. Avant que j’aie eu le temps de me poser tranquillement, elle s’est tournée vers le traducteur et lui a dit quelque chose en bengali. Il traduisit : « Elle dit, ne vous embêtez pas à pratiquer vipassana en ce moment. Pratiquez seulement metta, la bienveillance. » Je suis restée abasourdie. Nous ne nous étions même pas saluées et généralement c’est l’étudiant qui commence par poser une question !

– Pourquoi ? ai-je demandé.
Elle a dit encore quelque chose en bengali et l’interprète a traduit :
– Votre « cette vie » a des problèmes et il faut que vous y travailliez maintenant. Alors pratiquez seulement metta.

Et il me fit signe que l’entretien était terminé. J’étais ébahie. L’échange avait duré moins de deux minutes. Je savais que l’expression « cette vie » signifiait mes sentiments envers moi-même. Il était clair qu’elle avait vu que j’étais malheureuse et l’antidote qu’elle me prescrivait était la pratique de l’amour bienveillant.

Cette rencontre avec Dipa Ma m’a inspirée et, même si cela m’était difficile, j’ai suivi son conseil. J’ai récité intérieurement des mots de bienveillance aussi souvent que possible dans la journée et pendant mes temps de méditation. Au début, je n’ai pas senti de changement positif mais j’ai persévéré. Il a fallu environ trois mois pour que je commence à ressentir une authentique chaleur envers moi-même. Au bout de six mois, un changement très net en moi se produisait quand je commençais à pratiquer. Il y avait plus de douceur, plus d’ouverture et même de l’affection. Dipa Ma avait trouvé exactement le bon remède pour me secouer. Elle m’a conseillé un outil qui a radicalement modifié ma façon de penser et qui a apporté un réel changement dans ma vie.