Le Dhamma de la Forêt |
Une fois qu’il a abandonné tout attachement aux cinq khandha [les agrégats qui constituent le corps et l’esprit], le citta [l’esprit] est affiné à un point extrême. Cependant, bien qu’il ait lâché prise de toute chose, il lui reste à lâcher prise de lui-même. Sa nature connaissante intrinsèque demeure imprégnée par l’ignorance fondamentale d’avijjā de sorte qu’il ne connaît pas son essence véritable et, de ce fait, demeure attaché à lui-même. C’est là qu’avijjā [l’ignorance de la véritable nature du soi] se concentre en un unique faisceau de focalisation. Comme toutes ses voies d’expression extérieures ont été coupées, il converge dans le citta sans pouvoir s’écouler vers l’extérieur. Les voies d’expression d’avijjā sont les yeux, les oreilles, le nez, la langue et le corps, lesquels engendrent des images, des sons, des odeurs, des saveurs et des sensations tactiles. Quand l’attention et la sagesse ont été assez habiles pour couper définitivement ces voies d’expression, avijjā se retrouve sans aucun moyen de s’exprimer. Ses agents extérieurs ont été neutralisés ; tout ce qui reste, c’est une incessante vibration subtile qui résonne à l’intérieur du citta. Etant privé de toute possibilité d’extériorisation pour ses activités, il ne dépend plus que du citta pour se manifester. Tant que la sagesse n’est pas tout à fait capable de le transcender, avijjā se manifestera sous la forme de sensations subtiles de sukha, [bonheur], de sensations subtiles de dukkha [souffrance], et d’un rayonnement tout à fait exceptionnel. Ces éléments deviennent donc maintenant la base de travail du citta.
Toute réalité conventionnelle, même si elle paraît lumineuse et majestueuse, manifeste immanquablement une certaine irrégularité. C’est grâce à ces variations d’intensité que l’attention du citta sera alertée et cherchera des réponses satisfaisantes. Le sukha et le dukkha très subtils qui se manifestent dans le citta, tout autant que le rayonnement impressionnant qui en émane, ont leur origine dans avijjā. Mais comme nous ne les avons jamais vus auparavant, la première fois que nos investigations nous y conduisent, nous sommes trompés par leur apparence éblouissante et souhaitons nous en emparer. Avijjā nous berce dans un profond sommeil, nous faisant croire que les subtils sentiments de contentement et le rayonnement lumineux sont notre véritable essence, au-delà du nom et de la forme. Inconscients de notre erreur, nous acceptons ce citta majestueux – et l’avijjā qui l’accompagne – comme notre véritable « moi ».
Mais pas pour longtemps. A ce niveau, les puissantes facultés de l’attention suprême et de la sagesse suprême ne recherchent pas la gratification du moi. Elles continuent à scruter, à investiguer, à analyser, dans un sens et dans l’autre, continuellement. Finalement, elles vont réaliser la vérité. Elles remarqueront que les subtiles sensations de sukha et de dukkha varient légèrement et ces variations leur sembleront déplacées au cœur du majestueux rayonnement. Même si le dukkha qui se manifeste est très léger, il suffit à éveiller nos soupçons. Pourquoi le citta a-t-il des conditions qui varient ? Il n’est jamais constant. Ces minuscules fluctuations que l’on observe au cœur rayonnant du citta sont juste assez perceptibles pour attirer la circonspection de l’attention et de la sagesse.
Une fois qu’elles sont détectées, la suspicion apparaît et la sagesse est alertée : ces phénomènes doivent être étudiés de près. C’est ainsi que la capacité connaissante du citta devient le point central de l’investigation. L’attention et la sagesse se concentrent sur ce point, essayant de découvrir en quoi cette connaissance consiste vraiment. Elles ont déjà analysé tout le reste, étape par étape, au point que tous les autres facteurs ont été éliminés avec succès. Mais cette présence connaissante, si lumineuse, si extraordinaire, qu’est-elle exactement ? Tandis que l’attention et la sagesse se concentrent sur elle, le citta devient le point central d’une investigation à grande échelle. Il se transforme en champ de bataille où l’attention suprême et la sagesse suprême donnent le meilleur d’elles-mêmes. Bientôt, elles seront en mesure de détruire l’avijjā-citta qui, du point de vue d’avijjā, semblait si beau et majestueux. Elles le soumettront complètement, de sorte qu’il n’en restera pas la moindre trace dans le citta.
Quand ce phénomène est étudié avec les outils acérés et tranchants de la sagesse jusqu’à ce que sa nature soit clairement comprise, il se désintègre et se dissout d’une manière tout à fait inattendue. On pourrait appeler cet instant « l’Eveil sous l’arbre de la Bodhi » ou bien « la destruction totale des cimetières du samsāra » [le cycle incessant de la naissance et de la mort]. Une absolue certitude apparaît alors. Au moment où ce centre rayonnant se désintègre, quelque chose d’encore plus remarquable – quelque chose qui était jusque-là caché par avijjā – se révèle dans toute sa plénitude. A l’intérieur du citta, on dirait qu’une force fait trembler l’univers tout entier. Ce moment crucial, quand le citta brise toutes les chaînes qui le liaient aux formes de la réalité conventionnelle, est un instant d’émerveillement et de magnificence indescriptible. C’est précisément là, au moment où avijjā s’éteint définitivement, que l’Arahattamagga se transforme en Arahattaphala : quand la Voie est parcourue entièrement, les fruits de la Voie sont atteints. Le Dhamma et le citta sont arrivés à la perfection absolue. Dès lors, tous les problèmes cessent. Telle est la nature du Nibbāna [l’Eveil].
Quand ce rayonnement que nous trouvons si impressionnant finit par se désintégrer, une chose qu’il est impossible de décrire apparaît dans toute sa splendeur. C’est la nature de la Pureté Absolue.
Quand on le compare à cet état de pureté, l’avijjā que nous avions tellement admiré auparavant ressemble à de la bouse de vache tandis que la nature qui était dissimulée par avijjā ressemble à de l’or pur. Même un enfant sait faire la différence entre ce qui est le plus précieux des deux ; inutile de poursuivre la comparaison.
La désintégration d’avijjā marque le moment où Arahattamagga et Arahattaphala se retrouvent à leur destination finale. Si nous comparons cela à monter les escaliers qui mènent à l’entrée d’une maison, on peut dire que l’on a un pied sur la dernière marche et l’autre pied sur le seuil de la maison. Nous n’avons pas encore les deux pieds sur le seuil. Ce n’est que lorsque les deux pieds sont fermement plantés à l’entrée de la maison que nous pouvons dire que « nous sommes arrivés à la maison ». Le citta « arrive au Dhamma » quand ses deux pieds sont fermement plantés dans le Dhamma suprême. Il est arrivé à l’unicité du Nibbāna. Dès lors, le citta est complètement libéré ; il ne manifeste plus aucune activité pour se défaire des pollutions mentales. C’est Arahattaphala : le fruit de l’état d’Arahant. Seuls ceux qui sont complètement libérés des pollutions mentales peuvent y parvenir.
Quant à rūpa, vedanā, saññā, sankhāra et viññāna, ce ne sont que des conditions, des phénomènes naturels qui apparaissent puis disparaissent spontanément ; ils ne peuvent en aucun cas influencer ou contaminer le citta. Il en va de même pour les formes, les sons, les odeurs, les saveurs et les impressions tactiles : chacun a sa propre réalité séparée. Leur existence ne pose plus de problème car le citta est maintenant libéré de l’ignorance qui lui donnait de fausses idées à leur propos. Maintenant que le citta connaît la vérité, il a pleinement conscience de la réalité de sa présence connaissante de même que de la réalité de tous les phénomènes naturels internes et externes. Chacun ayant sa réalité séparée, les conflits qui existaient entre eux n’ont plus lieu d’être ; ils sont tous libres de suivre leur propre chemin. A ce stade, le long conflit entre les pollutions mentales et le citta arrive finalement à son terme.
Quand la vérité est ainsi révélée, le citta ne ressent plus aucune anxiété ou appréhension à propos de la vie ou de la mort des khandha. Le citta perçoit simplement les activités des khandha : comment ils apparaissent, interagissent et disparaissent, et comment ils finissent par se désintégrer au moment de la mort. Mais, dans la mesure où la nature connaissante essentielle du citta ne meurt jamais, la peur de la mort n’a pas lieu d’être. On accepte la mort quand elle vient et on accepte la vie quand elle continue. Ce sont deux aspects de la même vérité.
C’est ainsi que se conclut l’investigation du citta. Quand il atteint ce niveau, le citta est définitivement coupé de la naissance et de l’existence, complètement séparé de toutes les manifestations de l’ignorance et de l’avidité. L’état de « avijjā paccaya sankhāra » dans lequel « l’ignorance fondamentale conditionne l’apparition des phénomènes conditionnés » est complètement dissout. Il est remplacé par avijjā tveva asesavirāga nirodhā sankhārā nirodho : « la disparition et la cessation des phénomènes conditionnés qui met fin à toute la masse de souffrance ».
Quand avijjā s’éteint, les phénomènes conditionnés qui engendrent dukkha s’éteignent également. Ils ne font plus partie de la nature connaissante du citta. Les phénomènes conditionnés comme les pensées – qui sont partie intégrante des khandha – continuent à fonctionner dans leur propre sphère mais ne causent plus de dukkha. Non souillés par les kilesa, ils donnent simplement forme et direction à l’activité mentale. La conscience s’élève dans l’esprit purement et simplement, sans créer la moindre souffrance. Tous les organes des sens et tous les contacts sensoriels qu’ils engendrent sont simplement des phénomènes qui se produisent naturellement et existent selon leurs caractéristiques intrinsèques. Ils n’ont aucun effet négatif sur le citta qui a réussi à atteindre son but : la cessation complète de toute la masse de souffrance.
Quand l’ignorance et toutes les pollutions mentales s’éteignent, elles s’éteignent à l’intérieur du citta. L’extinction de l’ignorance sonne le glas du cycle des naissances et des morts. Il faut qu’avijjā et les kilesa aient tous disparu du citta car l’esprit d’ignorance – avijjā-citta – est l’essence du monde des renaissances, l’essence de la naissance, du vieillissement, de la maladie et de la mort. L’avidité sensorielle mue par l’ignorance est la cause principale de la naissance, du vieillissement, de la maladie et de la mort ; or elle n’existe qu’à l’intérieur du citta. Quand avijjā finit par se désintégrer, définitivement coupé du citta, la cessation totale est atteinte. Le citta est alors libre, vaste et suprêmement vide, sans limites, sans barrières, en expansion totale. Rien ne le retient ni ne le gêne. Toutes les contradictions ont été éliminées. Dès lors, quand le citta sait quelque chose, il ne sait que la vérité ; quand il voit, il ne voit que la vérité. Telle est la véritable vacuité.
Différents degrés de vacuité sont ressentis à plusieurs niveaux. La méditation samādhi en est un. En samādhi profond, le corps et l’esprit pensant disparaissent temporairement de la conscience. Le citta semble vide mais la durée de ce vide est limitée à la durée de la pratique du samādhi. Au début de la pratique de vipassanā, le citta peut se séparer du corps physique de manière permanente mais il ne peut pas encore se désengager des composants mentaux de la personnalité : sensations, souvenirs, pensées et conscience sensorielle. Il est complètement vide de formes physiques, de sorte que des images du corps n’apparaissent plus dans le citta mais il n’est pas vide de concepts mentaux. A ce niveau, la sagesse est capable de se distinguer de la masse physique qu’est le corps et donc de se dégager pour toujours de la croyance que le corps est soi, mais elle n’est pas encore capable de séparer les facteurs mentaux. En poursuivant l’investigation, le citta arrive à se détacher également des facteurs mentaux. Alors il ne reste rien d’autre qu’un rayonnement extraordinaire qui se diffuse dans le cosmos tout entier, une essence d’être lumineuse qui semble infinie et une merveilleuse et profonde vacuité mentale. Tel est le pouvoir impressionnant de l’authentique avijjā. En continuant à utiliser toute la puissance de l’attention et de la sagesse, avijjā sera finalement éteint au cœur même du citta. Quand tout ce qui pouvait envahir le citta a été retiré, on arrive à une authentique vacuité. La vacuité que l’on ressent à ce niveau-là est un désengagement total et permanent qui ne nécessite aucun effort pour être maintenu. Il est synonyme de liberté réelle et absolue pour le citta.
On peut comparer la différence entre la vacuité de l’avijjā-citta et celle du pur citta libéré d’avijjā à un homme se tenant dans une pièce vide. Debout au milieu de la pièce, admirant son espace vide, cet homme en arrive à s’oublier lui-même. Voyant qu’il n’y a rien dans la pièce, il ne pense qu’au vide qu’il perçoit et non au fait qu’il occupe la place centrale dans cet espace. Tant qu’il y a quelqu’un dans la pièce, elle n’est pas vraiment vide. Puis il finit par comprendre que la pièce ne sera vraiment vide qu’une fois qu’il l’aura quittée. A ce moment-là avijjā se désintègre et le pur citta se révèle.
Une fois que le citta a lâché les phénomènes de toutes sortes, il apparaît suprêmement vide. Mais celui qui admire ce vide, qui est impressionné par cette vacuité, celui-là survit. Le « moi » en tant que point de référence, qui est l’essence même d’avijjā, fait encore partie de la nature connaissante du citta. C’est la racine de l’ignorance. A ce moment-là, notre « moi » est le véritable obstacle. Dès qu’il se désintègre et disparaît, il ne reste plus aucun obstacle. Tout est vide : le monde extérieur est vide et l’intérieur du citta est vide. Comme pour l’homme dans la pièce vide, on peut dire que la pièce est vraiment vide seulement lorsque l’homme l’a quittée. Le citta qui a obtenu une compréhension totale de tous les phénomènes extérieurs comme de tout ce qui le concerne est dit complètement « vide ». La véritable vacuité n’apparaît que lorsque toute trace de réalité conventionnelle a disparu du citta.
L’extinction d’avijjā est tout à fait différente de ce que nous avons pu voir jusque-là. L’extinction des autres phénomènes était accompagnée d’une claire compréhension de leur véritable nature. Le rayonnement d’avijjā, par contre, est unique dans le sens qu’il s’éteint en un instant, comme un éclair dans le ciel. C’est un instant d’être qui arrive spontanément : il apparaît d’un coup puis disparaît complètement. C’est seulement à ce moment-là, quand le rayonnement disparaît, que nous comprenons qu’il s’agissait de l’essence même de l’ignorance. Ce qui reste alors est absolument unique et d’une nature absolument pure. Bien que nous ne l’ayons encore jamais ressenti, nous n’avons pas le moindre doute quand il apparaît à cet instant. Tout ce qui aurait pu engendrer le doute a disparu en même temps que le reste. C’est la fin de tous les soucis.
Toutes les allusions que l’on peut faire à « soi », à la véritable essence de son être, se rapportent précisément à cette ignorance fondamentale. Elles montrent que l’ignorance est encore intacte. Toutes les investigations sont faites en son nom. Ce « moi » est ce qui sait, ce « moi » est ce qui comprend. Ce « moi » est rayonnant, léger et heureux. « Je » et « à moi » : voilà où se trouve l’ignorance fondamentale. Nous faisons tout pour l’entretenir. Quand elle finit par se désintégrer, la perspective « personnelle » se désintègre aussi. On continue à faire les choses mais pas pour satisfaire une « personne ».
C’est comme une casserole dont le fond s’est détaché : on pourra y mettre autant d’eau que l’on voudra, il n’en restera pas une seule goutte. De même, pensées et idées continuent à apparaître et à disparaître en tant que fonctions naturelles des khandha mais rien n’adhère au citta parce que le récipient qui autrefois les retenait – avijjā – a été détruit. Une pensée apparaît à un instant et cesse l’instant d’après. Comme il n’y a personne pour les retenir et personne pour se les approprier, les pensées continuent simplement leur chemin et disparaissent. A l’intérieur, la nature qui a conscience de cette complète absence de soi connaît un contentement total. Cette nature est la pureté authentique et absolue ; elle est libre de tout fardeau.
La véritable nature du citta est si bien dissimulée par avijjā que nous ne voyons jamais l’incroyable beauté naturelle du citta authentique. Le piège d’avijjā est si bien déguisé que les méditants qui atteignent ce stade ne peuvent manquer de se faire prendre. Ils sont complètement éblouis par ce qu’ils croient être la vraie nature du citta. Ils chérissent tellement cette beauté rayonnante qu’ils ont le sentiment qu’ils doivent la conserver et la protéger à tout prix. Ils sont persuadés qu’il s’agit de ce qu’ils sont vraiment en essence, que ce merveilleux rayonnement leur appartient.
Cet authentique avijjā est un point de focalisation qui contient de nombreuses choses étranges et extraordinaires cachées en lui, des choses dont nous ne pourrions jamais soupçonner l’existence. Celles-ci contaminent le citta, un peu comme un tout petit morceau d’appât peut être suffisamment empoisonné pour tuer un animal. Comme il est virtuellement impossible de trouver des réalités conceptuelles auxquelles comparer les agents de contamination qui se cachent dans avijjā, je ne peux en donner qu’une brève explication. Ces agents comprennent : un rayonnement d’être si extraordinaire qu’il ressemble à un aboutissement ; un sentiment de bonheur tout à fait exceptionnel dû à la force du rayonnement qui imprègne le citta et qui paraît transcender toute réalité conventionnelle ; un sentiment d’invulnérabilité extrêmement puissant ; un attachement fervent et protecteur vis-à-vis de cette nature rayonnante, comme s’il s’agissait d’or pur.
L’avijjā-citta semble posséder toutes les qualités : il est lumineux, il est audacieux, il est parfaitement satisfaisant, et la connaissance qu’il recèle semble infinie. Mais bien qu’il ait effectivement une connaissance illimitée, cette nature connaissante ne se connaît pas elle-même. Telle est l’ignorance fondamentale de l’authentique avijjā. Dès que cette nature connaissante se retourne sur elle-même et regarde vers l’intérieur, avijjā se désintègre. Cette désintégration révèle alors la vérité du citta, la vérité du Dhamma. Seul avijjā nous empêche de voir cette vérité.
Les méditants qui n’auront pas encore développé suffisamment de sagesse auront du mal à se libérer des pièges d’avijjā car l’avijjā que l’on connaît en général et l’authentique avijjā sont deux choses très différentes. La nature de l’avijjā ordinaire combine tous les différents aspects de l’ignorance, extérieurs et intérieurs, en une seule pollution mentale – un peu comme un arbre qui est une combinaison de feuilles, rameaux, branches et tronc. L’authentique avijjā, par contre, est comme un arbre abattu et dépouillé de toutes ses branches. La sagesse, dans son effort persistant, a coupé toutes les « branches » d’avijja une à une, de sorte qu’il ne peut plus se manifester partout et doit se concentrer en un seul point : le citta. Arrivé là, avijjā n’a plus à sa disposition tous les instruments dont il disposait quand il était au commandement et c’est alors que nous découvrons l’authentique avijjā.
Les « repousses » d’avijjā sont nombreuses et variées. Toutes les autres pollutions mentales ne sont que ses branches et ses rameaux. En nous concentrant sur les repousses, nous avons tendance à ne pas tenir compte de la cause qui est à la racine. De ce fait, quand nous atteignons l’authentique avijjā, nous sommes dans la confusion, incapables de le reconnaître. C’est comme une plante grimpante qui apparaît quelque part et puis rampe au sol et grimpe tout en développant de plus en plus de repousses qui elles-mêmes grandissent et se mêlent les unes aux autres. Nous devons prendre cette plante en main et la suivre jusqu’à son point de départ. Là nous trouverons les racines. Quand nous arrachons les racines, toute la plante meurt.