Le Dhamma de la Forêt


Le Chemin qui mène à la Paix


Ajahn Chah


Traduit par Jeanne Schut
http://www.dhammadelaforet.org/ 

Extrait du livre Être ce qui est, éd. Sully



Notre pratique consiste à travailler pour extirper le désir, l’aversion, et la compréhension erronée que nous avons des choses — ces dérèglements mentaux qui existent en chacun de nous. Ils sont ce qui nous maintient dans la ronde du devenir et de la naissance et qui nous empêche de trouver la paix de l’esprit.

Réaliser la paix consiste non seulement à travailler avec l’esprit mais aussi avec le corps et la parole. Avant de pratiquer avec le corps et la parole, il faut pratiquer avec l’esprit ; mais si on ne pratique qu’avec l’esprit et que l’on néglige le corps et la parole, on n’obtiendra pas de résultat. Pratiquer avec l’esprit jusqu’à ce qu’il soit lisse, raffiné et beau, c’est comme fabriquer un beau pilier en bois. Avant d’avoir un beau pilier verni, il faut commencer par couper un arbre. Ensuite on va sectionner ses parties rugueuses — racines et branches — avant de le fendre, le scier et le travailler. Pratiquer avec l’esprit revient au même : il faut commencer par travailler sur les choses les plus grossières ; avancer à partir du rugueux pour arriver au lisse.

Dans la pratique du Dhamma, le but est de pacifier et de purifier l’esprit mais c’est difficile à faire. C’est pourquoi il faut commencer par l’extérieur — le corps et la parole — et avancer progressivement vers l’intérieur, jusqu’à ce que l’on atteigne ce qui est lisse et resplendissant. On peut comparer cela à un meuble fini, comme une chaise ou une table. Ils sont peut-être beaux aujourd’hui mais, au départ, ils n’étaient que des morceaux de bois rugueux avec des branches et des feuilles qui ont dû être rabotés et travaillés. C’est ainsi que l’on obtient un meuble qui soit beau ou un esprit qui soit parfait et pur.

En conséquence, la véritable voie qui mène à la paix, la voie que le Bouddha a montrée pour atteindre le véritable bonheur, est sila (la vertu morale), samadhi (la concentration méditative) et pañña, la sagesse. Telle est la voie de la pratique. C’est la voie qui mène à l’abandon complet de l’attachement au désir, de l’aversion et de la confusion mentale. Cette voie implique d’aller à l’encontre de nos tendances habituelles à la facilité et à la recherche du plaisir et du confort. Il faut donc que nous soyons prêts à endurer certaines difficultés et à faire des efforts.

Le Bouddha a enseigné que c’est ainsi que fonctionne la pratique pour nous tous. Tous ses disciples qui sont allés jusqu’au bout de la Voie et ont trouvé l’Eveil total avaient été auparavant des êtres ordinaires vivant dans le monde, tout comme nous. Ils avaient des bras et des jambes, des yeux et des oreilles, de l’avidité et de la colère, tout comme nous. Ils n’avaient aucun trait particulier qui les rendait essentiellement différents de nous. Ils ont pratiqué et ils ont fait apparaître l’Eveil à partir du non éveillé, la beauté à partir de la laideur, et un grand bienfait à partir de ce qui était inutile. Il faut que vous compreniez que vous avez le même potentiel. Vous êtes constitué des cinq agrégats, tout comme eux. Vous avez un corps, des sensations agréables et désagréables, des souvenirs et des perceptions, des formations mentales et une conscience sensorielle, ainsi qu’un esprit agité et vagabond. Vous avez conscience du bien et du mal — exactement comme eux. Ceux qui se sont éveillés à l’époque du Bouddha n’étaient pas différents de nous. Ils ont tous commencé comme des êtres ordinaires non éveillés. Certains avaient même été des bandits et des meurtriers. Le Bouddha leur a donné l’inspiration nécessaire pour qu’ils pratiquent jusqu’à atteindre la Voie et ses Fruits. De nos jours, de la même façon, des gens comme vous trouvent l’inspiration pour entreprendre la pratique de la vertu morale, la méditation et la sagesse.

Si votre esprit est capable d’être attentif, il n’est pas si difficile de surveiller vos paroles et vos actions physiques puisqu’elles sont motivées et supervisées par l’esprit. C’est dans l’esprit que les intentions de toutes vos actions prennent naissance.

Vous apprenez d’abord à veiller sur vous-même avec attention — en éveillant « ce qui sait », le même qui, autrefois, vous poussait à agir de manière incontrôlée et nocive. Ensuite, grâce à la modération et à l’attention, vos paroles et vos actions deviennent plaisantes, agréables à l’œil et à l’oreille, tandis que vous demeurez en paix et à l’aise dans cette modération.

Veiller constamment à être dans la modération, présent et conscient de ses actions et de ses paroles, et assumer la responsabilité de sa conduite, c’est sila, la vertu morale. Etre inébranlablement ancré dans la pratique de l’attention et de la modération, c’est samadhi, la concentration méditative — samadhi en tant que facteur externe dans la pratique qui sert à maintenir sila, mais également un aspect intérieur plus profond de samadhi.

Une fois que l’esprit est profondément engagé dans la pratique et que sila et samadhi sont fermement établis, vous serez en mesure d’approfondir votre investigation et de réfléchir à votre expérience des différents phénomènes internes et externes. Quand l’esprit entrera en contact avec des objets visuels, des sons, des odeurs, des goûts, des sensations tactiles ou des idées, « ce qui sait » apparaîtra et vous fera prendre conscience de vos réactions de désir ou de rejet, de bonheur ou de souffrance, et des différents types d’objets mentaux et conditions dont vous ferez l’expérience.

Si vous êtes attentif, vous verrez les objets qui passent par votre esprit et vos réactions à ces objets. « Ce qui sait » s’en emparera automatiquement comme objets de contemplation. Discerner le bien du mal et le juste du faux parmi tous les phénomènes de votre champ de conscience, c’est pañña, la sagesse, c’est la sagesse à ses débuts ; elle mûrit ensuite au fil de la pratique. C’est ainsi que la vertu morale, la méditation et la sagesse se pratiquent au commencement.

En continuant la pratique, vous constaterez que de nouveaux attachements et de nouveaux types de compréhension erronée apparaîtront dans l’esprit. Cela signifie que vous commencez à vous attacher à ce qui est bon et sain ; vous avez peur des imperfections ou des défauts de votre esprit, craignant que votre samadhi n’en pâtisse. En même temps, vous commencez à être diligent, vous travaillez dur, vous aimez et vous nourrissez votre pratique. A chaque fois que l’esprit entre en contact avec des phénomènes, vous êtes inquiet et tendu. Vous prenez aussi conscience des défauts des autres, jusqu’aux moindres choses qu’ils semblent faire de travers. C’est parce que vous vous préoccupez de votre pratique. Ceci, c’est pratiquer à un certain niveau, c’est une pratique basée sur une vision des choses en accord avec les fondements essentiels des enseignements du Bouddha.

Si vous continuez à pratiquer ainsi, vous en arrivez peut-être au point où vous êtes constamment en train de juger et de trouver des défauts à tous ceux que vous rencontrez. Vous réagissez constamment par le désir et l’aversion au monde qui vous entoure, vous devenez plein d’incertitudes tout en vous attachant continuellement à des opinions sur comment pratiquer. C’est comme si vous étiez obsédé par la pratique. Mais ne vous en inquiétez pas. A ce niveau-là, mieux vaut pratiquer trop que trop peu. Pratiquez beaucoup et consacrez-vous à veiller sur le corps, la parole et l’esprit. Vous ne pourrez jamais trop en faire de ce côté.

Une fois ce fondement en place, vous aurez établi dans votre cœur un fort sentiment de honte et de peur à l’idée de faire du mal. Quels que soient le lieu et l’heure, en public comme en privé, vous ne voudrez rien faire qui soit nuisible à vous ou aux autres. Vous maintiendrez constamment le cap sur la pratique de l’attention et de la retenue au niveau du corps, de la parole et de l’esprit, et sur la distinction claire entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. En vous concentrant ainsi et, en persévérant avec constance et régularité dans cette façon de pratiquer, l’esprit devient effectivement sila, samadhi et pañña.

Au fil de votre pratique, ces différentes qualités se perfectionnent en même temps. Cependant, pratiquer à ce niveau-là ne suffit pas encore pour engendrer les facteurs de jhana ou « absorption méditative ». Même si l’esprit a commencé à s’affiner, la pratique est encore trop grossière. Bien sûr, pour une personne ordinaire non éveillée qui n’a jamais prêté attention au fonctionnement de son esprit, qui n’a jamais pratiqué la méditation ni développé l’attention, c’est déjà un raffinement appréciable de l’esprit. C’est un peu comme quelques centaines d’euros qui représentent beaucoup pour un pauvre et presque rien pour un millionnaire. Quelques centaines d’euros peuvent représenter beaucoup quand les temps sont durs. De la même manière, dans les premiers temps de la pratique, quand on arrive à se libérer des souffrances mentales les plus grossières, cela peut déjà paraître assez profond si on n’est pas éveillé et que l’on n’a jamais pratiqué ni lâché prise auparavant.

Mais, arrivé à ce niveau-là, il est possible que vous ressentiez l’envie de pratiquer à la pleine mesure de vos capacités. Si c’est le cas, cela signifie que vous avancez sur la voie juste. Vous en êtes encore à la première étape, laquelle est assez difficile à suivre avec constance. Mais pendant que vous l’approfondissez et que vous la raffinez, sila, samadhi et pañña vont mûrir ensemble à partir de là, à partir de ce même matériau brut. C’est comme les cocotiers : ils absorbent l’eau de la terre et la font remonter par le tronc. Quand l’eau finit par atteindre les noix de coco, elle est devenue propre et douce alors qu’elle provient de cette eau ordinaire de la terre. Le cocotier est nourri par ce que sont essentiellement les éléments bruts de la terre et de l’eau. Il les absorbe et les purifie et puis ces éléments se transforment en quelque chose de beaucoup plus doux et plus pur qu’avant. De la même manière, la pratique commence à partir d’un état brut mais quand l’esprit est affiné par la méditation et la réflexion, il devient de plus en plus subtil.

Plus l’esprit s’affine, plus l’attention est en mesure de se focaliser. En fait, la pratique devient plus facile quand l’esprit se tourne de plus en plus vers l’intérieur pour s’observer lui-même. A partir de là, vous ne faites plus de grosses erreurs, vous ne faites plus de gros écarts hors de la voie. Quand le doute se présente dans différentes situations, par exemple si telle ou telle manière de parler ou d’agir est juste ou erronée, vous arrêtez simplement la prolifération mentale et, en intensifiant vos efforts, vous tournez votre attention plus profondément vers l’intérieur. La concentration méditative devient progressivement plus stable et la sagesse est plus grande, de sorte que vous voyez les choses plus clairement avec une aisance croissante.

Le résultat final est que vous parvenez à voir clairement l’esprit et les objets de l’esprit sans avoir à faire de distinction entre l’esprit, le corps et la parole. Vous voyez que le corps dépend de l’esprit pour fonctionner mais que l’esprit lui-même est constamment soumis aux différents objets qui entrent en contact avec lui et le conditionnent. Alors que vous continuez à vous tourner vers l’intérieur et que votre sagesse mûrit, vous vous retrouvez à contempler l’esprit et ses objets — autrement dit, vous commencez à ressentir le corps comme quelque chose d’immatériel. L’aspect physique du corps est ressenti comme des objets sans forme entrant en contact avec l’esprit.

Maintenant, en examinant la nature de l’esprit, vous pouvez constater que, dans son état naturel, il n’a aucune préoccupation. Il est comme un drapeau en haut d’un mât ou une feuille sur un arbre. De lui-même, il reste au repos ; s’il bouge c’est à cause du vent, d’une force extérieure. Dans son état naturel, l’esprit est égal, sans désir ni aversion, il n’attribue aucune caractéristique aux choses et ne trouve de défauts à personne. Il est indépendant et existe dans un état de pureté claire, rayonnante et immaculée. Dans son état naturel, l’esprit est paisible, sans bonheur ni souffrance. Tel est le véritable état de l’esprit. Et le but de la pratique est de rechercher à l’intérieur, de pénétrer en profondeur, jusqu’à retrouver l’esprit originel.

L’esprit originel est également connu comme « l’esprit pur ». C’est l’esprit sans attachements, qui n’est pas altéré par les objets mentaux et qui ne recherche rien d’agréable ni de désagréable. Par contre, il demeure continuellement dans un état de présence attentive, pleinement conscient de tout ce dont il fait l’expérience.

Quand l’esprit est ainsi, il ne « devient » rien et rien ne peut l’ébranler. Pourquoi ? Parce que la conscience est présente ; l’esprit se connaît comme étant pur. Il a atteint son état original d’indépendance. Ce résultat a pu se produire grâce à la faculté d’attention doublée d’une sage réflexion, en voyant que tout ce qui se produit n’est que le produit de conditions qui apparaissent quand certaines circonstances sont réunies, en dehors du contrôle d’une quelconque individualité.

Dans le passé, à cause des racines du désir, de l’aversion et de l’ignorance de la véritable nature des choses qui existaient dans l’esprit, à chaque fois que vous aviez conscience de la moindre chose agréable ou désagréable, l’esprit réagissait immédiatement. Vous vous en saisissiez et vous étiez forcé de passer par des états de bonheur ou de souffrance. Vous étiez constamment emporté dans ces états mentaux. Grâce à une sage réflexion, vous pouvez maintenant voir que vous succombiez à de vieux schémas d’habitudes et de conditionnements. L’esprit lui-même est libre, en réalité, mais vous souffrez du fait de vos attachements. Il en va ainsi tant que l’esprit ne se connaît pas, tant qu’il n’est pas éveillé. Il n’est pas libre, il est influencé par tous les phénomènes qui entrent dans son champ de conscience. En d’autres termes, il est sans refuge, incapable de dépendre véritablement de lui-même.

L’esprit originel, au contraire, est au-delà du bien et du mal. Mais quand vous vous en séparez, tout devient incertain et il se produit un incessant enchaînement de naissances et de morts, d’insécurité, d’anxiété et de difficultés sans aucun moyen d’y mettre fin.

D’ordinaire, si quelqu’un vous critique vous allez en être perturbé. Accepter les impressions sensorielles de cette manière, sans une présence pleinement attentive, donne l’impression d’être poignardé. C’est de l’attachement. Une fois que vous avez été poignardé, il y a « devenir », changement, et ce changement devient la cause d’une naissance dans un autre état. Mais si vous vous exercez à ne pas attacher d’importance aux phénomènes, rien n’apparaît dans l’esprit — c’est comme si quelqu’un vous houspillait dans une langue étrangère : les mots n’ont aucun sens pour vous, de sorte que vous n’absorbez pas l’information et vous ne créez pas de souffrance à ce propos.

Samadhi signifie un esprit dont la concentration est stable et, plus vous pratiquez, plus elle devient stable. Plus vous contemplez, plus vous avez confiance. Il devient plus facile de voir clairement l’apparition et la disparition de la conscience sensorielle d’un moment à l’autre. L’esprit devient vraiment stable jusqu’au point où absolument rien ne peut l’ébranler et vous savez en toute confiance qu’aucun phénomène n’a le pouvoir de l’agiter. Si l’esprit passe par des états mentaux bons et mauvais, de bonheur et de souffrance, c’est parce qu’il se laisse tromper par les objets qu’il perçoit alors qu’en réalité, les objets de l’esprit sont les objets de l’esprit et l’esprit est l’esprit. Si l’esprit ne se laisse pas tromper par eux, il n’y a pas de souffrance. L’esprit libéré des vues erronées ne peut pas être ébranlé. C’est un état de présence consciente dans lequel tous les phénomènes sont vus comme des éléments qui apparaissent puis disparaissent.

Il arrive que l’on ait cette expérience sans pouvoir lâcher complètement prise pour autant. Que vous puissiez lâcher prise ou pas, ne vous laissez pas décontenancer. Vous devez avant tout, au minimum, développer et maintenir ce niveau de présence consciente et de détermination absolue. Il faut vous y tenir et détruire les sources de souffrance grâce à un effort déterminé, en avançant de plus en plus profondément dans votre pratique.

Quand vous aurez perçu le Dhamma de cette façon, l’esprit reviendra à un niveau de pratique moins intense. Les Ecritures décrivent cela en disant que l’esprit passe par un « changement de lignée » par référence à un esprit qui a transcendé les limites de l’esprit humain ordinaire. C’est l’esprit de la personne ordinaire non éveillée qui fait une brèche dans le domaine du Noble Etre éveillé. Mais cela se produit encore dans l’esprit de la personne ordinaire non éveillée. Une telle personne, ayant progressé dans sa pratique jusqu’à gagner une expérience temporaire du nirvana, s’en retire et continue à pratiquer à un autre niveau parce qu’elle ne s’est pas complètement libérée de toutes ses afflictions. C’est comme quelqu’un qui veut traverser une rivière ; arrivé à mi-chemin, il sait bien que la rivière a deux rives mais il n’arrive pas à la traverser complètement, alors il recule.

Comprendre qu’il y a deux rives, c’est comme changer de lignée. Cela signifie que l’on connaît le chemin qui mène au-delà des afflictions mentales mais que l’on est encore incapable de le suivre ; alors il faut reculer. Une fois que l’on a fait soi-même l’expérience de la réalité de l’état de transcendance, cette connaissance demeure constamment présente et on continue à pratiquer la méditation et à développer ses perfections spirituelles. On est sûr, tant du but à atteindre que de la voie la plus directe pour y parvenir.

Pour dire les choses simplement, cet état qui est apparu est l’esprit lui-même. Si on contemple les choses selon la vérité de ce qui est, on constatera qu’il n’existe qu’une seule Voie et qu’il n’y a rien d’autre à faire dans la vie que de la suivre. On comprend que les états de bonheur et de souffrance ne sont pas la voie à suivre. S’attacher aux uns comme aux autres fera apparaître la souffrance. On comprend cela et on est attentif à maintenir cette vision juste des choses mais, en même temps, on n’est pas encore capable d’abandonner complètement ses attachements.

Il faut donc avancer sur la voie du milieu, ce qui signifie être conscient des différents états de bonheur et de souffrance et, dans le même temps, les tenir à distance. A chaque fois que l’esprit s’attache à un état de bonheur ou de souffrance, on est toujours conscient de cet attachement. Même quand on se saisit des états positifs, on ne les encourage pas et on ne les valorise pas ; de la même manière, on n’éprouve ni mépris ni crainte face aux états négatifs. Ainsi on peut observer l’esprit exactement tel qu’il est et à tout moment prendre la voie médiane de l’équanimité comme objet de l’esprit. L’équanimité ne manquera pas d’apparaître comme étant la voie à suivre et on devra avancer sur cette voie, pas à pas.

Quand finalement l’esprit est pleinement conscient des différents états positifs et négatifs, il est en mesure de mettre de côté le bonheur et la souffrance, le plaisir et la tristesse, de mettre de côté tout ce qui est le monde et de devenir ainsi Celui qui connaît le monde. L’esprit qui a la pleine connaissance peut alors lâcher prise et s’apaiser, pour la simple raison que l’on a pratiqué et avancé sur la voie jusqu’à ce point. On sait ce qu’il faut encore faire pour arriver au bout du chemin et on continue à faire les efforts nécessaires pour déraciner et déloger ses attachements.

Quand on se concentre sur les conditions de l’esprit d’instant en instant, il n’est pas nécessaire de rencontrer un maître pour parler de son état d’esprit ou faire quoi que ce soit de spécial. Quand il y a attachement à des états d’esprit heureux ou malheureux, il doit y avoir, en même temps, la claire et ferme compréhension qu’un tel attachement est le fruit d’une vision erronée des choses. Un tel attachement est un attachement au monde, c’est être piégé dans le monde. Qu’est-ce donc qui crée le monde ? Le monde est créé et nourri par l’ignorance parce que nous ne sommes pas conscients que l’esprit donne de l’importance aux choses, qu’il les façonne et crée de nouveaux sankhara (formations mentales) à tout moment.

C’est là que la pratique devient vraiment intéressante.